Fabriquer un translateur

Question fondamentale : comment fabriquer un objet que l'on ne comprend pas ? Les premiers scientifiques à étudier le translateur n'avaient aucune idée de la manière dont il opérait ses sauts supraluminiques, et nous ne sommes pas beaucoup plus avancés. Nous savons à quoi il ressemble et nous savons ce qu'il fait ; le comment nous échappe et l'assemblage d'un translateur est comparable à celui d'une voiture par une civilisation possédant les plans d'un moteur thermique mais ignorant tout du principe de la combustion interne.
Les composants d'un translateur sont « simples » : des composés cristallins en quatre dimensions, excrétés par la plante pseudonigella stellaris, ou nigelle stellaire. Un translateur lambda nécessite de récolter un millier de fleurs à maturité, puis de filtrer les cristaux et de les raffiner, toutes opérations qui imposent le recours à une main-d’œuvre très qualifiée.
Une fois la quantité de cristaux adéquate rassemblée, le translateur est assemblé par accolage des cristaux individuels à l'aide d'une solution neutre jusqu'à obtenir une forme cohérente, qui est ensuite poncée. Ce translateur assemblé voit ensuite sa surface gravée de millions de petites lignes à l'échelle nanométrique, qui permettront, une fois l'installation terminée, au navigateur du vaisseau d'envoyer des ordres par le biais de subtiles vibrations. La gravure est la partie la plus cruciale du processus de manufacture du translateur ; si les lignes sont incorrectement réalisées, elles peuvent rendre le translateur inutilisable. Trop fines ou trop profondes, elles ne compromettront pas l'usage, mais mèneront à une usure prématurée. C'est à cette étape que se révèle la véritable difficulté ; seule une poignée d'usines dans l'Espace Commun ou sur Elora sont capables de mener la gravure à bien.
Une toute petite partie du translateur, la « pointe blanche » sera laissée libre de toute gravure et servira par la suite à apposer le numéro de série et la signature de la commune d'assemblage. Au fur et à mesure de la carrière du translateur, le reste de cet espace sera recouvert par les sceaux des différents vaisseaux auxquels il sera apparié. Une pointe blanche vierge est la marque indéniable d'un translateur artisanal ou illégal.
Après la gravure, le translateur est prêt à être installé sur son premier vaisseau-hôte. Il est placé dans une chambre dédiée, au centre de gravité du bâtiment, puis relié à un complexe « nid » constitué d'aiguilles venant de positionner dans les lignes de surface, et qui feront office d'interface avec les systèmes de bord. Techniquement simple, cette installation demande toutefois une grande patience de la part de l'opérateur, et est généralement conduite en gravité nulle.
Enfin, le translateur est pris en charge par le navigateur du vaisseau, qui se charge de le régler de manière à optimiser sa performance, ce qui passe la plupart du temps par l'installation d'un logiciel ad hoc, qui prend en compte divers paramètres, de la forme du vaisseau à ses trajets-types, pour augmenter la vitesse de calcul des translations et diminuer la marge d'erreur de réintégration. Ce réglage n'est omis que dans les cas où le translateur est installé sur des supports standardisés, comme un missile supraluminique.