Les Communes Sélénites

"La Lune seule le sait."
Les Communes Sélénites constituent l'une des entités politiques les plus puissantes de l'espace humain. Fondées par des syndicats de travailleurs orbitaux à la fin du Bas-Âge, elles contrôlent la Lune, sous la forme d'une commune autogérée. Si elles sont désormais une fédération syndicaliste de dix millions de citoyens, elles n'ont pas oublié leurs modestes origines, qui encore aujourd'hui dictent une organisation politique fondée sur l'appartenance de l'individu à un complexe réseau de coopératives, définies par leur production économiques. Ces coopératives sont représentées dans une assemblée bicamérale, le Conseil de Séléné. Il est constitué d'une chambre basse où les coopératives sont représentées proportionnellement au nombre de ses membres, ainsi que d'une chambre haute où elles le sont par un nombre fixe et égal de délégués. Les activités économiques lunaires sont corrélées à la géographie du satellite ; ainsi, les coopératives agricoles sont installées dans les tunnels de lave des basses-terres équatoriales, tandis que les hautes-terres polaires sont le domaine des chantiers navals.
L'appartenance à une commune est libre, et on observe une importante mobilité de l'une à l'autre au cours de la vie d'un citoyen sélénite. La petite taille de la Lune assure en outre un très important brassage social par simple proximité géographique. Si les Communes Sélénites autorisent la propriété personnelle, elles interdisent la propriété privée, de sorte que tous les biens productifs appartiennent auxdites coopératives, tandis que le Conseil de Séléné a le contrôle exclusif sur les forces armées.
Les possessions planétaires des Communes Sélénites sont limitées. La Lune est une cité-planète dense, presque surpeuplée, qui pourtant abrite moins de citoyens que certaines mégalopoles terriennes comme Lagos ou New Delhi. Par-delà ses frontières, les Communes Sélénites contrôlent une poignée d'astéroïdes miniers, mais l'essentiel de leur présence extrasolaire est assurée par des stations spatiales et autres flottes commerciales : le grand vide reste le véritable domaine des enfants de la Lune, bien qu'ils aient renoncé à leur double monopole sur les moteurs à fusion et sur le voyage supraluminique. Les chantiers naval sélénites sont réputés bien au-delà du système solaire, et les Communes n'hésitent pas à manufacturer coques et stations pour quiconque est disposé à les payer. Les travailleurs orbitaux comme les ingénieurs sélénites comptent en outre parmi les plus réputés de l'espace humain et sont régulièrement délégués comme experts à plusieurs centaines, voire milliers d'années-lumière de leur monde d'origine. Dans ces liens économiques réside le véritable de la fédération lunaire : qui oserait se dresser contre les ingénieurs ayant conçu plus de la moitié des vaisseaux en service dans les flottes militaires et commerciales du monde ?
Cette forme de soft power technologique n'est toutefois pas au goût de tout le monde. Les Communes Sélénites n'ayant aucune allégeance, sinon à leurs clients spatiaux, elles s'attirent souvent le mépris, voire l'hostilité, des puissances politiques amarrées au sol de leurs planètes. De manière plus profonde, leur organisation politique fondée sur le travail -- où la vie politique et souvent personnelle d'un individu dépend de sa fonction productive -- les place en porte-à-faux vis-à-vis des états syndicalistes plus modernes, comme l'Ecoumène Elorain, dont la définition de la citoyenneté est beaucoup plus large et inclusive. Certains politologues considèrent même les Communes Sélénites comme une relique de la deuxième conquête spatiale, reflétant une manière de penser la société qui n'a plus lieu d'être à l'âge interstellaire.
Et pourtant, les enfants de la Lune persistent.
Logo des Communes Sélénites créé pour Starmoth par Lazare Viennot.